Les Mystères d'Udolphe - Radcliffe
Publié le 22 Juin 2008
Les Mystères d'Udolphe
D' Ann Radcliffe
Edition Folio classique
905 pages
A la fin du XVè siècle, à la mort de ses parents, Emilie Saint-Aubert est confiée à sa tante, Mme Chéron, qui épouse peu après Montoni, un
gentilhomme italien à la réputation douteuse. Montoni emmène son épouse et sa nièce en Italie. Emilie doit se séparer de son fiancé peu fortuné, le chevalier Valancourt, sans espoir de le revoir
un jour.
A Udolphe, château mystérieux aux allures de forteresse, Emilie est à la merci de Montoni et de ses amis, mais elle est également témoin de phénomènes étranges. Et des histoires curieuses
circulent sur l'ancienne propriétaire du château.
Quatrième de couverture : Ann Radcliffe publie en 1794 The
Mysteries of Udolpho. Les romantiques anglais, et les Victoriens, lui ont voué un culte. En France, Balzac, Hugo, Nodier, Féval, Sue, se souvinrent d'elle. On ignore ce qui a pu pousser cette
petite bourgeoise à la vie ordinaire à raconter des histoires terrifiantes, qu'on appelle « gothiques » en Angleterre et « noires » en France parce qu'elles cherchent à provoquer la crainte chez
les lecteurs.
Émilie explore le château mystérieux, chandelle à la main, à minuit. La menace (surnaturelle?) est partout présente. Les séquestrations, les tortures ne sont pas loin. Quel est le dessein du maître des lieux? Quels sentiments éprouve la jeune fille pour son tuteur et geôlier? Qui épousera-t-elle, après cette quête de soi à travers les corridors du château, qui ressemblent à ceux de l'inconscient? Ce n'est pas pour rien qu'un chapitre porte en épigraphe ces mots de Shakespeare: « Je pourrais te dire une histoire dont le moindre mot te déchirerait le coeur. »
Ce roman date de la fin du XVIIIè siècle et a été écrit en pleine vogue du roman noir (ou gothique). On y voit donc des héroïnes qui sont en butte à un environnement propice au fantasme et à la peur. Le château d'Udolphe est effectivement tel que l'on imagine les bâtiments des romans gothiques, sombre à souhait, plein de recoins, de détours, d'escaliers dérobés qui mènent on ne sait où. Il y a plusieurs énigmes imbriquées dans le récit qui commence dans le Languedoc où Emilie a passé son enfance puis continue en Italie, à Venise puis au château d'Udolphe, dans les Apennins. Il y a donc beaucoup de détails, de détours dans l'histoire, de descriptions qui participent à l'ambiance gothique, aussi bien de paysages que de bâtisses. L'auteur a su créer une atmosphère propice à l'histoire par la description de sons et de l'environnement très particulier, une obscurité propice au mystère très exploitée, qui participent à cette ambiance.
Les cent premières pages prêtent pourtant beaucoup à sourire. Il y a une telle pureté d'âme, de sentiments, cela en devient presque écoeurant. Et puis, tout y est grandiloquent: les amants contrariés se font des déclarations à base de "ah", de "oh" et de points d'exclamation. Les personnages passent leur temps à pleurer ou s'évanouir et j'avoue que même si je ne me suis pas ennuyée grâce à l'écriture très dynamique du récit, je ne pensais pas réussir à maintenir mon attention jusqu'au bout. Pourtant, dès que les éléments mystérieux commencent à se mettre en place, ça devient passionnant. Cela n'a rien de terrifiant pour le public d'aujourd'hui mais il y a néanmoins un grand sens du suspens et c'est bien mené. J'ai en outre beaucoup aimé la "résolution" très rationnelle des énigmes. C'est écrit avec finesse et intelligence. Il faut dire que la traduction un peu désuète, parfois, mais vraiment charmante et particulièrement agréable de Victorine de Chastenay (c'est la première traduction, gardée par Folio) est probablement pour beaucoup dans le plaisir de la lecture. Il y a donc certainement quelques longueurs (les malheurs d'Emilie se multiplient et auraient donc peut-être pu être raccourcis) mais il y a aussi de très beaux passages et somme toute, la lecture se révèle en général plus agréable qu'ennuyeuse. En fait, c'est si prenant que ça se lit vite malgré le nombre de pages.