Le songe d'une nuit d'été - Shakespeare
Publié le 27 Septembre 2011
De William Shakespeare
Première parution: Entre 1590 et 1596
Edition Dover
176 pages
A Athènes, Thésée s’apprête à épouser Hyppolite, reine des Amazones. Hermia et Lysander s’aiment, Helena aime Demetrius qui aime Hermia et a le consentement d’Egée, le père d’Hermia. Hermia refuse de céder à la volonté de son père qui demande à Thésée de juger l’affaire. Si Hermia n’accepte pas d’épouser Demetrius, elle sera condamnée à entrer au couvent, voire exécutée. Elle s’enfuit avec Lysander, poursuivie par Demetrius lui-même poursuivi par Helena. Les quatre jeunes gens se retrouvent dans un bois proche d’Athènes au moment où Obéron et Titania, roi et reine des fées se disputent un enfant humain recueilli par Titania. Dans ce même bois, une troupe d’artisans reconvertis en comédiens amateurs répète une tragédie qui sera jouée lors du mariage de Thésée. L’espiègle Puck, serviteur d’Oberon va s’amuser à perturber tout ce petit monde.
Le songe d’une nuit d’été est une pièce que je ne me lasse jamais de relire. C’est une des plus belles comédies de Shakespeare (et donc de la littérature mondiale). Tout dans cette pièce me donne l’impression d’être sous le coup d’un enchantement (Puck aurait-il utilisé un peu de ce philtre à base de pensée sur moi ?). Parce que disons-le, le point de départ n’est à priori pas fait pour me plaire. On a quand même là un mariage forcé de la reine des Amazones, un égoïste qui préfère voir la femme dont il est amoureux tuée plutôt que de renoncer à elle alors qu’elle ne l’aime pas, une jeune femme qui trahit sa meilleure amie pour l’amour d’un homme qui l’a rejetée et une reine des fées bernée par son époux. Il y a de quoi créer une tragédie mais on sait que tout finira bien. Les femmes ne sont pas à la fête dans cette pièce (alors que les comédies de Shakespeare ont justement le mérite de souvent laisser une belle place aux femmes comme dans Les Joyeuses commères de Windsor ou Beaucoup de bruit pour rien)et l’histoire d’amour n’est pas des plus passionnantes parce qu’à part Helena qui manque de confiance en elle et se pose quelques questions sur la nature du désir, on a surtout affaire à des jeunes gens très centrés sur eux-mêmes (ce qui donne quand même une excellente scène où Hermia devient obnubilée par sa petite taille).
Et pourtant, cette pièce est sublime parce qu’on entre très facilement dans ce songe et qu’on suit avec délectation les protagonistes subir des contretemps. Tout s’enchaîne sans temps mort et l’écriture de Shakespeare est toujours merveilleusement efficace et poétique. Face à ces humains que l’amour rend un peu idiots, il y a des amants féeriques, Obéron et Titania qui se prennent beaucoup moins au sérieux et qui apportent beaucoup de légèreté. Puck, qui n’est pas toujours responsable des quiproquos mais qui les observe toujours de son air malicieux est un personnage très marquant et la cour des fées participe à l’atmosphère générale de la pièce.
A côté de la comédie subtile, il y a de vrais moments de farce (à laquelle va quand même être mêlée Titania) avec les comédiens dont le moins que l’on puisse dire est qu’ils ne sont pas très doués. Le plus hilarant d’entre eux, Bottom est délicieusement ridicule quand il se croit bon acteur et qu’il se comporte comme un âne ce qu’il va finir par être au sens propre pendant un temps grâce à Puck. La pièce finit sur une scène de mise en abyme d’anthologie dans laquelle ces acteurs incapables réussissent à transformer une tragédie en une version parodique des drames de l’amour.
Cela fait donc vingt ans que cette pièce m’enchante et que je la relis avec le même plaisir. En outre, les illustrations d’Arthur Rackham sont superbes et méritent que l’on acquière de cette édition anglaise.
Une lecture commune avec Efelle.
“Lord, what fools these mortals be!”
« Seigneur, que ces mortels sont fous! »
Et si j’ai relu cette pièce, c’est parce que ma copine de shakespirite chronique et moi sommes allées voir la pièce à Stratford-upon-Avon, la ville de naissance de Shakespeare.
C'était ma première théâtrale pour le Songe d'une nuit d'été et ce fut une expérience extraordinaire. Après un début plus que
convaincant qui se déroulait dans une ambiance de vieux film de gangsters, nous avons été subjuguées par la partie féerique de la pièce. Que ce soit le décor simple mais magnifié par un jeu de
lumières extraordinaire, la mise en scène, les chorégraphies et le jeu des acteurs, il n’y avait pas une seule fausse note, tout était parfait de bout en bout. Les acteurs de la Royal Shakespeare
Company sont toujours excellents et savent tout faire, jouer, chanter et faire de sublimes glissades sur des oreillers qui les projettent presque dans le public. Puck, le personnage central de la
pièce est assez surprenant. On s’attendrait à un lutin au physique de chérubin (dans le style des dessins de Rackham) et on voit
apparaître un homme grand et svelte qu’on imagine plus en costume dans la City qu’avec un habit clownesque au milieu des bois. Il incarne un Puck très pince-sans-rire qui de temps en temps se
laisse aller à une pitrerie et ça fonctionne très bien. Helena a l’air très névrosée, ce qui pourrait agacer mais je dois dire que j’ai aimé. En fait les quatre jeunes gens de la pièce s’en
donnent à cœur joie et m’ont paru plus comiques que lors de la lecture. Quant à l’acteur qui incarne Bottom, il est exactement tel que je le voyais à la lecture de la pièce. Et son costume d’âne
est très réussi (il a même des talons qui font penser à des sabots) La dernière scène est d’une drôlerie exceptionnelle tant les acteurs sont tous parfaitement dans le rôle, entre Pyrame qui en
fait des tonnes et qui met longtemps à mourir, Thysbé qui a du mal à garder sa voix de femme, le lion qui a du mal à gérer les effets spéciaux et le mur qui fait ce qu’il peut.
Ce Midsummer Night’s dream est le plus beau spectacle qu’il m’ait été donné de voir. J’ai vraiment l’impression d’avoir vécu un rêve comme les protagonistes de la pièce.
Si vous en avez la possibilité, n'hésitez pas, ça se joue jusqu'au 5 novembre au Royal Shakespeare Theatre de Stratford-upon-Avon.