Guerre et Paix - Tolstoï
Publié le 9 Janvier 2011
La Guerre et la Paix
De Léon Tolstoï
Titre original: Voina i mir
Première parution: 1869
Edition Points
1242 pages
Quatrième de couverture : « Dites-moi, pourquoi cette vilaine guerre ? » Dans une Russie agitée par l’approche des troupes napoléoniennes, la noblesse tsariste se passionne pour les bals, les mariages et les successions. La guerre emporte dans sa tourmente les amours tumultueuses de Nicolaï et Natacha Rostov, les errances mystiques de Pierre Bézoukhov et les idéaux du prince Andreï Bolkonski. Un tableau féroce et grandiose d’une société bouleversée par l’implacable marche de l’Histoire.
La Guerre et la Paix est un roman d’une telle richesse qu’il est difficile d’en parler et presque impossible de le résumer. Tolstoï y présente l’histoire de la Russie au temps des guerres napoléoniennes, de 1805 à 1813, à travers le destin de plusieurs personnages de l’aristocratie russe. Tous sont pleins de défauts et très attachants. Pierre n’est pas le jeune premier idéal de roman, puisqu’il est présenté comme gros, pas très beau et maladroit. Gentil et généreux, il se laisse diriger par ses émotions, ce qui le pousse à commettre des actes qu’il regrette. Il passe la plus grande partie du roman à chercher un sens à sa vie. Son ami Andreï, au contraire, est dans l’action. Il est rationnel et réussit tout ce qu’il entreprend. Il s’engage dans l’armée malgré son admiration pour Napoléon. A l’inverse de Pierre, son intelligence le pousse à être hautain et à se couper des gens et des sentiments. Natacha Rostov est une adolescente joyeuse et délurée mais inconstante en amour. Elle a la fraîcheur qui manque à la plupart des personnages féminins du roman qui sont pour beaucoup dans le calcul et l’artifice. Autour de ces personnages, une multitude d’autres vient se greffer. Les analyses psychologiques sont d’une grande finesse.
Au-delà des personnages dont on suit les tribulations avec un grand intérêt, Tolstoï part dans de nombreuses digressions philosophiques ou historiques. On y parle beaucoup de guerre, mais Tolstoï n’a pas de fascination pour les héros et les batailles sont peu décrites, le plus souvent c’est pour en montrer l’absurdité, les erreurs des « génies militaires » (à l’existence desquels l’auteur ne croit guère). L’irrationalité des motifs des personnages, qu’ils soient historiques comme Koutouzov ou Napoléon ou qu’ils soient inventés comme Pierre ou Natacha est ce qui revient le plus souvent. Pierre ne cesse de s’interroger sur le vide de sa vie qui lui parait si artificielle au milieu de la noblesse moscovite, tandis qu’Andreï connaît une expérience similaire lors de la bataille d’Austerlitz. Et tout le long du roman, cela revient en permanence sous une forme ou une autre. L’écriture simple et directe de Tolstoï rend cela clair et passionnant. Il y a juste quelques petites longueurs dans la deuxième partie, avant que l’action ne se mette totalement en place. On subit l’attente de la bataille au même titre que les soldats russes et ce n’est pas toujours palpitant, mais cela ne représente qu’une cinquantaine de pages sur plus de 1200, ensuite, il est difficile de s’extirper de la lecture.
Par ailleurs, cette édition proposée par Points est une version plus courte et plus légère, révisée par Tolstoï. Elle est excellente mais la fin me semble différer beaucoup de celle du Livre de Poche que j’avais lue lors de ma première lecture de ce grand roman. Ici, la fin est vraiment rapide, avec des points de divergences (si mes souvenirs sont bons). J’avais préféré la fin de la version du Livre de Poche mais cette version reste tout à fait bonne et recommandable, surtout si trop de passages philosophiques font peur.
Lu dans le cadre de la semaine russe de Cryssilda et Emma. Merci aux éditions Points