Orgueil et préjugés (ciné 2005)
Publié le 23 Avril 2009
129 min
Réalisé par Joe Wright, scénario de Deborah Moggach
D’après le roman de Jane Austen
Avec Keira Knightley (Elizabeth Bennet), Matthew Macfadyen (Mr. Darcy), Rosamund Pike (Jane Bennet), Donald Sutherland (Mr. Bennet), Simon Woods (Mr. Bingley), Brenda Blethyn (Mrs. Bennet), Claudie Blakley (Charlotte Lucas), Kelly Reilly (Caroline Bingley)
En Angleterre, dans un petit village du Hertfordshire, au tournant des XVIIIe et XIXe siècles, Elizabeth Bennet, jeune fille vive et intelligente, est l’une des cinq filles d’un gentleman, et sa favorite. En vertu de la loi, la propriété des Bennet, à la mort de Mr Bennet, passera aux mains d’un cousin éloigné, Mr Collins. Mrs Bennet rêve donc d’un bon mariage pour ses filles, surtout pour Jane, l’aînée et la plus belle.
Lorsque Mr Bingley, un jeune gentleman au revenu confortable loue une propriété près de Longbourn, la vulgaire et peu subtile Mrs Bennet se montre prête à tout pour encourager l’amour naissant de Jane et Bingley. Les sœurs de Bingley et Mr Darcy, un ami, voient cette relation d’un très mauvais œil. Il dédaigne cette compagnie vulgaire et montre beaucoup de condescendance, au point de se faire détester de tous malgré sa richesse. Et lorsque Wickham, un jeune et séduisant officier arrive et raconte à Lizzie ses déboires avec Mr Darcy, elle est prête à le haïr.
Ce film, je l’ai vu à sa sortie et en le revoyant maintenant, il reste une énigme pour moi. Cette version de l’excellent roman d’Austen n’est pas une adaptation du roman d’Austen que je peux vraiment aimer mais c’est une comédie romantique acceptable (tout le monde n’a pas la chance d’avoir Jane Austen comme dialoguiste). Le début me plait même malgré un certain manque de subtilité. Les pauvres sont très pauvres et les riches très riches (ce que je peux excuser car honnêtement, comment montrer la subtilité des relations sociales en deux heures ?) et Elizabeth est une vraie rebelle donc elle a les cheveux détachés. Soit ! Dans la mesure où cette partie a le mérite de ne pas complètement oublier la comédie de mœurs et la satire sociale, je peux l'accepter. J’ai même été ravie de retrouver cette réplique du roman dans laquelle Elizabeth explique qu’un poème est le meilleur moyen de mettre fin à une belle amourette (c’est une de mes répliques favorites du roman). Mon cerveau s’est quand même rebellé devant la vision horrifique d’une Mrs Bennet juchée sur un meuble en public (mais comment a-t-elle pu grimpé là d’ailleurs ?). Mais, à part une certaine tendance à se regarder filmer (ce qui donne quelques plans magnifiques, je l’admets) et à faire des plans un peu longs à mon goût, au détriment du scénario, je trouve ça plaisant à regarder. En plus la première heure du film fait la part belle à certains acteurs secondaires, surtout Tom Hollander (Mr Collins) et Claudie Blakley (Charlotte Lucas), les personnages les mieux développés du film. En revanche, d’autres sont hélas sacrifiés aux plans interminables sur Lizzie et sa balançoire. Le passage de Wickham est vraiment rapide. Un sourire, une tirade contre Darcy et Lizzie n’aura plus l’occasion de lui parler.
Là où ça se gâte franchement, c’est à partir de la déclaration. Là, presque plus rien ne me plait. Je me suis même ennuyée par moments. Là, c’est comme si Wright filmait l’histoire de Lizzie et Darcy au premier degré, sans aucun recul ironique et parfois avec une tendance à la mièvrerie. Là, tout le contexte s’effrite peu à peu. Ça confirme que les histoires d’amour qui finissent bien m’ennuient à mourir. Le réalisateur a sorti l’artillerie lourde de l’imagerie romantique. On aurait vu des minis Eros tournoyant autour des têtes de nos héros romantiques que j’aurais à peine été surprise. Parfois, j’ai ri, comme on rit devant un film à l’humour involontaire, devant le manque de finesse des métaphores : la visite au « musée » de Pemberley me fera toujours mourir de rire (ah ! La métaphore de l’éveil à la sensualité vue par un bulldozer, depuis Rambo mitraillant une armée entière de vietnamiens à lui seul, je n’avais plus vu un truc aussi énorme !). Mon cerveau a parfois préféré se déconnecter complètement pour m’éviter l’énervement, comme à l’arrivée de Lady Catherine de Bourgh de nuit, devant des Bennet en tenue de nuit et assez justement sidérés (euh, même de nos jours c’est impensable, non, ou alors est-ce que je viens d’une famille psychorigide ?). Et à la fin, Lizzie « fait sa Marianne Dashwood » dans de grandes envolées de colère contre sa famille (mon cerveau goguenard s’est un peu réveillé pour ajouter un « de toute façon, vous êtes tous trop que des fachos »), là on est franchement dans le contresens par rapport à Austen (et de là à en conclure que l’amour rend vraiment idiot…).
Quant aux acteurs principaux, je n’ai rien de particulier à leur reprocher. Ils correspondent à l’image que le réalisateur et la scénariste (c’est à elle que j’en veux le plus dans cette histoire) ont voulu montrer et c’est cette image qui me déplait. J’ai même trouvé que Matthew McFadyen, sur qui je n’aurais pas misé ma chemise (même mouillée) en voyant l’affiche, a réussi à m’être acceptable, à défaut de me convaincre.
La mise en images est certes très belle, flamboyante même et j’aurais pu l’apprécier s’il s’était agi d’une autre histoire mais elle est ici au service d’une histoire d’amour à l’exaltation plus proche de l’univers de Charlotte Brontë que de celui d’Austen. Au-delà de ça, j’aurais pu accepter quelques défauts mais là, l’accumulation des petits (et parfois des grands) détails agaçants finit par lasser et par occulter les qualités. Je me suis aperçue en revoyant ce film que je me souvenais plus de ce que je n’avais pas aimé que des qualités et j’ai encore vu de nouveaux défauts. Il y a de bonnes choses, même dans la symbolique mais c’est montré de façon tellement grossière !
C’est en fait un film très hollywoodien, fait pour un très grand public et finalement très dans l’air du temps.