La Petite Dorrit - Dickens
Publié le 12 Février 2009
Little Dorrit
De Charles Dickens
Première parution: 1857
Édition Oxford World’s Classics
752 pages
L’histoire commence à Marseille. Rigaud parle du meurtre de sa femme avec son compagnon de cellule. Dans cette même ville, Arthur Clennam attend de pouvoir rentrer à Londres après la mort de son père.
A Londres, Arthur se rend auprès de sa mère, bigote et invalide, qui vit cloîtrée dans sa maison avec ses deux vieux serviteurs, Flintwinch et sa femme maltraitée, Affery. Arthur soupçonne qu’il s’est passé quelque chose de grave dans sa famille (et qui a provoqué la séparation de ses parents). Intrigué par l’intérêt que sa mère porte à Amy Dorrit, employée comme couturière, il soupçonne que la famille Dorrit pourrait être impliquée. Il suit Amy, qu’il surnomme « Little Dorrit » jusqu’à la prison pour dette de la « Marshalsea » pour découvrir son secret.
Là, il rencontre Mr Dorrit, emprisonné depuis vingt ans.
Le roman est en deux parties. Le première « Poverty » s’intéresse à la prison de la « Marshalsea ». Mr Dorrit n’est pas seulement enfermé dans la prison mais aussi dans son rôle de gentleman déchu. En parallèle, Mrs Clennam est également enfermée mentalement autant que physiquement, prisonnière de ses principes moraux, sa froideur à l’égard de son fils Arthur.
On y découvre une foule de personnages, comme toujours. Il y a toujours des personnages qui ont l’air tout droit sortis d’un univers fantasmagorique, comme le sinistre Rigaud, le meurtrier ou Pancks, le collecteur de loyers de « Bleeding Heart Yard ». Le personnage principal dans cette première partie, c’est aussi la prison pour dette, avec son fonctionnement interne propre. Là, il n’y a pas de grands criminels. Les gens y refont une sorte de société parallèle aux gens de l’extérieur. Mr Dorrit est une sorte d’attraction locale. Il est un mélange d’arrogance et de faiblesse. Tout tourne autour de son statut social et de tout ce que ses enfants doivent lui cacher comme le fait qu’ils sont obligés de travailler pour survivre. Ses deux aînés sont d’ailleurs également très orgueilleux quant à leur rang. Seule Amy, laissée un peu en jachère, échappe à cette attitude et est en conséquence consciente de la réalité de la situation de la famille et s’occupe de tous.
Les deux personnages principaux sont très attachants. Amy Dorrit est née et a été élevée dans la prison et ses qualités sont surtout dues à l’attention qu’elle a reçue des gardiens, son père étant trop puéril pour être un bon père. Elle se sacrifie en permanence pour une famille aimante à sa façon mais avant tout égoïste. Arthur Clennam souffre de l’indifférence de sa mère. Il manque d’assurance. Il a eu une déception amoureuse dans sa jeunesse et ne pense pas qu’on puisse l’aimer. Il est incapable de voir qu’Amy l’aime.
Le mystère qui plane est impalpable pendant une bonne partie du roman. Quel est le lien entre tous les personnages qui entrent en scène, les Clennam, les Dorrit, les sympathiques Meagles et Tattycoram, Miss Wade qui semble haïr le monde, les hautains Merdle, l’infâme Rigaud, les Barnacle, membres du Bureau des Circonlocutions ? Comme Arthur, on se demande ce qui a poussé sa mère, complètement recluse, à prendre Amy sous son aile. Assez vite, pourtant, ce fil conducteur est rompu et le récit part alors dans de très nombreuses digressions (c’est encore plus complexe que Bleak House ou Our Mutual Friend).
Dans la deuxième partie, « Riches », en effet, l’intrigue est plus ténue, le mystère autour de la famille Clennam est totalement oublié pendant un très long moment. On ne le retrouve qu’à la fin, avec une disparition mystérieuse, un chantage et la résolution de tous les mystères. Entre temps, l’histoire se concentre sur la vie de la petite Dorrit et de sa famille. Mais il est aussi beaucoup question d’argent. L’argent est au centre de l’histoire. L’argent va et vient et les individus ont des revers de fortune divers. La spéculation fait des dégâts. Les fortunes se font et se défont. D’ailleurs, l’histoire commence dans une prison pour dettes et y retourne comme pour faire une boucle.
D’ailleurs, se perdre dans les digressions de Dickens fait partie du plaisir de la lecture, même si j’ai moins retrouvé la fantaisie et l’exubérance habituelles de l’auteur. Mais c’est tout relatif car sa description du bureau des Circonlocutions, caricature de la bureaucratie absurde est savoureuse et sa dénonciation de la spéculation boursière est très actuelle. Et puis le dénouement est assez inattendu, ce qui est inhabituel chez Dickens. C’est en effet le premier roman de Dickens dont la résolution de l’intrigue n’est pas évidente. J’ai beaucoup aimé et pourtant, ce n’est pas tout à fait un coup de cœur. Je ne suis pas déçue parce que un livre de Dickens que j’ai un peu moins apprécié reste au dessus du lot.
Les romans de Dickens :
Esquisses de Boz
Les Aventures de M. Pickwick (The Pickwick Papers)
Le Magasin d'antiquités (The Old curiosity shop)
Barnaby Rudge
Martin Chuzzlewit
Un Conte de Noël (A Christmas Carol)
Dombey et fils
David Copperfield (Lu)
La Maison d'Apre-Vent (Bleak House) (Lu)
Les Temps difficiles (Hard times)
La Petite Dorrit (Little Dorrit)
Un conte de deux villes (A Tale of two cities)
De grandes espérances (Great expectations) (Lu)
L'Ami commun (Our mutual friend) (Lu)