Le Vampire - Polidori
Publié le 31 Octobre 2010
Le Vampire
De John William Polidori
d'après Lord Byron
Titre original:The vampyre
Première parution: 1819
Edition Acte sud, Babel
80 pages
Quatrième de couverture : Au milieu des cercles de la haute société que le retour de l'hiver réunit à Londres, on voyait un seigneur aussi remarquable par ses singularités que par son rang distingué. Spectateur impassible de la gaieté qui l'environnait, il semblait ne pouvoir la partager. Si la beauté, par un doux sourire, fixait un instant son attention, un seul de ses regards la glaçait aussitôt et remplissait d'effroi ces cœurs où la légèreté avait établi son trône. La source de la terreur qu'il inspirait était inconnue aux personnes qui en éprouvaient les effets ; quelques-uns la cherchaient dans ses yeux gris et ternes, qui ne pénétraient pas jusqu'au fond du cœur, mais dont la fixité laissait tomber un regard sombre dont on ne pouvait supporter le poids. Ces singularités le faisaient inviter dans toutes les maisons : tout le monde souhaitait le voir. Les personnes accoutumées aux sensations fortes, et qui éprouvaient le poids de l'ennui, étaient charmées d'avoir en leur présence un objet de distraction qui pût attirer leur attention.
Le Vampire est un des premiers textes en prose sur le mythe du vampire et c'est le premier succès littéraire du genre. Il est né d'un défi entre amis, les romantiques Lord Byron et Percy Shelley ainsi que Mary Shelley qui va alors écrire le très fameux Frankenstein. Lord Byron a l'idée d'un récit de vampires mais il finit par donner ses notes à son médecin et secrétaire particulier, John Polidori. C'est ainsi que c'est finalement ce dernier qui écrira le texte définitif de cette nouvelle.
Dans la bonne société de Londres apparaissent au même moment deux personnages. Lord Ruthven est un personnage charismatique, sophistiqué, original et séducteur mais qui semble s'intéresser plus aux jeunes filles innocentes et pures qu'aux femmes séductrices. Le jeune Aubrey est beau, riche et romantique. Aubrey est vite fasciné par Lord Ruthven et les deux décident de voyager ensemble. Mais peu à peu, Aubrey est choqué par la conduite de Lord Ruthven qui semble prendre un plaisir presque cruel à ne laisser derrière lui que des jeunes hommes ruinés et des jeunes femmes déshonnorées. Il décide alors de le quitter non sans avoir prévenu la famille d'une jeune femme italienne des moeurs dissolues de Ruthven. Le jeune homme va alors être victime de la rancune de Lord Ruthven.
Cette nouvelle est très agréable à lire malgré quelques excès dans la présentation du héros romantique qui sombre dans la folie dès qu'il ne sait plus quoi faire pour agir (même si c'est très gros, ce n'est pas tout à fait ridicule car l'auteur a plutôt bien justifié ça par l'impossibilité d'agir). On y voit un vampire qui sort le jour sans problème, qui n'a pas les attributs du vampire (pas d'ail ni d'eau bénite) mais qui est déjà cruel et sophistiqué. Ce qui ressort et qui sera rarement démenti par la suite, c'est le lien étroit, dans la littérature, entre vampirisme et sexualité.
Plus que le suspens, qui comme dans la plupart des livres de l'époque, n'est pas le point le plus
intéressant, c'est une certaine tension psychologique que Polidori a réussi à introduire qui fait que ce récit se suit avec intérêt jusqu'à la fin. Et bien sûr, pour tout amateur de littérature
vampirique, ce court texte est indispensable puisqu'il forme avec Carmilla de Sheridan Le fanu et Dracula de Bram Stoker un des fondements du genre.
"Le jeune Aubrey songea plus à cultiver son imagination que son jugement. De là, il prit ces notions romantiques d’honneur et de candeur qui perdent tant de jeunes écervelés. Il croyait que le cœur humain sympathise naturellement à la vertu, et que le vice n’a été jeté ça et là, par la Providence, que pour varier l’effet pittoresque de la scène : il croyait que la misère d’une chaumière n’était qu’idéale, les vêtements du paysan étant aussi chauds que ceux de l’homme voluptueux ; mais mieux adaptés à l’œil du peintre, par leurs plis irréguliers et leurs morceaux de diverses couleurs, pour représenter les souffrances du pauvre."