Orgueil et préjugés (BBC 1995)
Publié le 21 Avril 2009
1995 – BBC – 5 h (6 épisodes)
Réalisé par Simon Langton, scénario de Andrew Davies
D’après le roman de Jane Austen
Avec Jennifer Ehle (Elizabeth Bennet), Colin Firth (Mr. Darcy), Susannah Harker (Jane Bennet), Julia Sawalha (Lydia Bennet), Alison Steadman (Mrs. Bennet), Benjamin Whitrow (Mr. Bennet), Crispin Bonham-Carter (Mr. Bingley), Anna Chancellor (Miss Bingley), Adrian Lukis (Wickham), David Bamber (Mr. Collins), Lucy Scott (Charlotte Lucas), Barbara Leigh-Hunt (Lady Catherine de Bourgh)
En Angleterre, dans un petit village du Hertfordshire, au tournant des XVIIIe et XIXe siècles, Elizabeth Bennet, jeune fille vive et intelligente, est l’une des cinq filles d’un gentleman, et sa favorite. En vertu de la loi, la propriété des Bennet, à la mort de Mr Bennet, passera aux mains d’un cousin éloigné, Mr Collins. Mrs Bennet rêve donc d’un bon mariage pour ses filles, surtout pour Jane, l’aînée et la plus belle.
Lorsque Mr Bingley, un jeune gentleman au revenu confortable loue une propriété près de Longbourn, la vulgaire et peu subtile Mrs Bennet se montre prête à tout pour encourager l’amour naissant de Jane et Bingley. Les sœurs de Bingley et Mr Darcy, un ami, voient cette relation d’un très mauvais œil. Il dédaigne cette compagnie vulgaire et montre beaucoup de condescendance, au point de se faire détester de tous malgré sa richesse. Et lorsque Wickham, un jeune et séduisant officier arrive et raconte à Lizzie ses déboires avec Mr Darcy, elle est prête à le haïr.
Cette adaptation d’Orgueil et préjugés de Jane Austen est exactement ce que j’attends d’une adaptation de Jane Austen. En réalité, il s’agit presque plus d’une mise en images du roman que d’une adaptation même s’il y a un certain nombre de modifications, dans l’ensemble de bon aloi (Lydia en petite tenue dans les couloirs alors que Mr Collins est là me semble en trop cependant). Il faut dire que cette version bénéficie d’un avantage certain. Le format de cinq heures permet de prendre en compte tous les aspects de l’œuvre originale, ce que ne permettra jamais un film (c’est un des rares grands avantages de la télévision sur le cinéma). La comédie romantique est certes un peu accentuée, pour un public d’aujourd’hui, mais ceux et celles qui comme moi préfèrent la comédie de mœurs (voire de comédie tout court) seront également comblés. On la retrouve de bout en bout.
Cette simple « mise en images » est selon moi, dans le cas de Jane Austen, une réussite parce que cela rend bien compte de la simplicité du style d’Austen qui n’est pas dans la démonstration ni l’exubérance mais dans la précision. Le scénario est particulièrement réussi. Beaucoup de répliques sont issues du roman mais même les autres, inventées par Andrew Davies ne déparent pas. J’aurais dû détester la scène de la chemise (ce qui me gêne n’est d’ailleurs pas la chemise mais le caleçon : je ne peux imaginer un homme tel que Darcy se présentant en caleçon devant son personnel) et pourtant, dans la dynamique de comédie, c’est passé. Les décors et les costumes sont particulièrement réussis pour une œuvre de télévision même à gros budget (on peut même voir le passage des saisons à la longueur des manches).
La plus grande réussite de cette adaptation, c’est certainement le choix des acteurs. Le couple Ehle/Firth incarne à la perfection ma vision du couple Lizzie/Darcy. Jennifer Ehle a un regard pétillant qui fait passer énormément de choses à l’écran. Elle parvient à faire passer l’impertinence de Lizzie en ayant la maturité nécessaire pour ne pas tomber dans l’impolitesse. C’est un des aspects du roman les plus importants pour moi et j’ai été très agréablement surprise de retrouver cette sensation à l’écran. Quant à Colin Firth, il possède naturellement ce côté froid et raide qui peuvent si facilement passer pour du mépris. Il incarne parfaitement un caractère aristocratique au sens des convenances poussé à l’extrême, réservé autant que hautain. De la même façon que pour Ehle, ce n’est souvent que par le regard que derrière ces conventions et cette raideur aristocratiques transparaissent des émotions. Il compose un personnage aussi subtil que celui du roman. J’adore particulièrement les scènes clés, où il déclare sa passion tout en se contraignant à garder des manières de parfait gentleman. Ses manières compassées tranchent alors avec les vives émotions que la plus ouverte Lizzie ne peut s’empêcher de mettre en avant. Ça me rendrait presque romantique. Presque, parce que c’est quand elle se moque de lui que j’aime le plus, il ne faut pas pousser tout de même.
J’ai rarement eu autant le sentiment qu’un scénariste avait adapté un roman que j’aime en pensant à moi. Aucune adaptation n’atteint jamais la perfection, mais pour moi, celle-ci est ce qui s’en rapproche le plus. Ça a été un choc pour moi, la première fois que je l’ai vue, quelques temps après ma découverte des romans. Et je ne m’en lasse pas malgré les cinq heures que dure la mini-série. Je pense que c’est le cadeau que j’ai le plus offert depuis dix ans d’ailleurs (et toujours avec succès).