Le peuple d'en bas - London
Publié le 9 Avril 2009
Le peuple d’en bas
De Jack London
Titre original: The people of the abyss
Première parution: 1902
Edition Phébus Libretto
250 pages
Quatrième de couverture : 1902. London, déguisé en clochard, se perd pendant trois mois dans les bas-fonds de Londres, et en rapporte ce témoignage terrifiant.
Loin des avenues de l'aventure, mais au plus près des réalités d'un siècle qui, décidément, commençait sous de bien sinistres couleurs.
1902. Victoria vient de mourir et l'Angleterre prépare le couronnement de son successeur. London, jeune journaliste américain se fait passer pour un marin en rupture de ban pour pouvoir s’immerger totalement dans les bas-fonds de l’est londonien et vit comme ses habitants. Le Royaume-Uni est alors un grand Empire et une réussite économique incontestable. Pourtant un adulte sur quatre à Londres meurt dans un hospice ou à l’asile. Selon Jack London, 939 habitants sur 1000 finissaient indigents en Grande-Bretagne à cette époque.
Le récit est exemplaire. Clair, intéressant, London raconte avec une certaine ironie les problèmes rencontrés par les pauvres et qui les mènent à ces situations terribles. La description des conditions de vie est terrible. Dans un premier temps, London observe. Il parle avec les gens, tente de se loger, de manger, de passer une nuit à l’asile. Il commence par chercher un logement. Cela permet de décrire la crise du logement que connaît Londres à cette période. Des logements ont été transformés en locaux professionnels pour des besoins économiques et les demandes de logement augmentent. Les prix augmentent donc beaucoup et la surpopulation s’étend avec le manque d’hygiène qui en découle. La description des asiles est également terrifiante : l’hygiène et la nourriture sont insuffisants mais les vagabonds n’ont pas d’autre choix que de s’y rendre car la police les empêche de dormir dans les rues ou les parcs et s’ils ne trouvent pas une place dans un asile, ils sont condamnés à marcher toute la nuit. Là, ils passent parfois des nuits blanches et ils doivent assister à l’office, ce qui les empêche de chercher du travail. C’est donc difficile pour tous. Les jeunes survivent plus ou moins bien mais malheur à qui est vieux et seul sans soutien ! Et il est difficile de ne pas finir seul dans ces conditions d’hygiène désastreuse.
Au fil du récit, le socialisme de London transparaît de plus en plus. L’ouvrage se fait alors plus analytique mais aussi plus militant. London compare la situation d’un ouvrier britannique à celle de son équivalent aux Etats-Unis. Les travailleurs anglais sont si peu alimentés qu’ils sont peu productifs. Il dénonce aussi la justice absurde qui condamne les tentatives de suicide alors qu’elle est tolérante avec certaines formes de violences.
Avec ce récit plus ou moins journalistique, j’ai découvert un Jack London très différent de celui des récits de mon enfance, Croc-blanc et l’appel de la forêt. C'est un excellent écrivain. Son écriture est très agréable et son ironie permet aussi de faire passer ses idées au demeurant très intéressantes. A côté de ses descriptions, la misère décrite par Dickens dans ses romans paraît bien édulcorée. J’ai été frappée par l’actualité de certains thèmes abordés. Un très bon livre, à découvrir pour tous ceux qui s’intéressent à cette époque.
Reçu dans le cadre du Victorian Christmas swap. Merci Madame Charlotte.